Pages

mercredi 2 février 2022

Dans les forêts de Sibérie

Dans les forêts de Sibérie, Sylvain Tesson, 2011



Sylvain Tesson nous emmène avec lui pendant 6 mois dans une cabane en Sibérie, près du lac Baïkal. Une solitude seulement rompue par une caisse de livres qui ont voyagé avec lui, deux chiens, dans une nature glaciale et magnifique qui est un personnage à elle seule. On ne peut que réfléchir en profondeur dans de telles circonstances, et reconsidérer la hiérarchie de ses priorités ; c’est ce que fait l’auteur, avec brio et poésie. 

Un livre qui réchauffe l’âme malgré son titre et qu’il est bon de déguster à petites lampées au coin du feu.

Quelques passages pour vous mettre l’eau à la bouche :

« Je pense au destin des visons. Naître dans la forêt, survivre aux hivers, tomber dans un piège et finir en manteau sur le dos de rombières dont l’espérance de vie sous les futaies serait de trois minutes… Si encore les femmes couvertes de fourrure avaient la grâce des mustélidés qu’on écorche pour elles. » (p.39)

« Côtoyer les bêtes est une jouvence. » (p.111)

« Pour un moujik, la France offre deux sujets d’étonnement : que le peuple de la Grande Armée implore l’aide de son gouvernement quand il tombe deux centimètres de neige et qu’il laisse les cités brûler alors que trois mille soldats sont déployés dans les montagnes afghanes. » (p.152)

« Rien ne me manque de ma vie d’avant. Cette évidence me traverse alors que j’étale du miel sur les blinis. Rien. Ni les biens, ni les miens. Cette idée n’est pas rassurante. »(p.176)

« Il n’y a que chez moi, à Paris, que les intellectuels nourrissent une fascination à l’endroit de salauds et héroïsent les criminels. »(p.200)

« Je ferme les livres et pleure dans les poils de mes chiens. Je ne savais pas que la fourrure des bêtes absorbait si bien les larmes. Sur la peau des êtres humains, elles glissent. Les chiens, d’habitude sautent partout à cette heure. Ce soir, ils se tiennent tranquilles sous mon misérable petit déluge, penchant un peu la tête. »

« Qui a raison ?  Le moujik autarcique qui remet son âme au ciel mais ne pénètre jamais dans un magasin ? Ou le moderne athée, affranchi de tout corset spirituel, mais qui est contraint de téter les mamelles de système et de se plier aux injonctions imposées par la vie en société ? »(p.231)

« Une sieste sur les galets de la plage avec les chiens couchés sur moi. Aïka et Bêk, mes maîtres en fatalisme, mes consolateurs, mes amis qui n’attendez rien d’autre que ce que l’immédiat vous réserve dans la gamelle de la vie, je vous aime bien. »(p.266)


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les commentaires sont modérés. Ne seront retenus que ceux qui sont en rapport avec le sujet, clairement énoncés, courtois, et non injurieux.